Désobéissance et résistance civile. La non-violence comme stratégie de défense pour l’exercice des droits politiques

Nacional

Il y a un certain nombre d’aspects qui caractérisent la désobéissance. Qui désobéi ne se cache pas, bien au contraire. L’action de désobéissance prend tout son sens de que elle est publique et socialisée. On essaye de focaliser toute l’attention sur l’injustice que l’on dénonce par la voie de l’action de désobéissance. C’est pour cela que celui qui désobéi assume toutes les conséquences légales de son action. 


Hanna Arendt, en 1970, souligné que l’une des situations dans lesquelles la désobéissance civile émergeait c’était quand un nombre significatif de citoyens arrivaient à la conviction que les moyens habituels pour changer les lois ne fonctionnait plus et que, par conséquence, leurs demandes ne seraient plus entendues et encore moins résolues. D’après Arendt, dans ces situations le changement sera toujours le résultat d’actions qui prennent la forme de la violation d’une loi. Plus tard la loi pourra stabiliser et légaliser ces changements mais pour se produire il aura fallu désobéir les lois en vigueur. En suivant le même schéma, la négation du droit à l’autodétermination par l’Etat espagnol – à savoir, le fait d’interdire au peuple catalan devenir c’est qu’il souhaite devenir de façon collective comporte que la voie de la désobéissance devient nécessaire afin de pouvoir, finalement, matérialiser et rendre possible l’exercice d’un droit revendiqué par un nombre significatif de personnes. De cette volonté de décider de la part des catalans et du blocage de la part de l’Etat, naisse le referendum désobéissant du 1-O en 2017. Dans le contexte de l’Etat espagnol, l’exercice effectif du droit d’autodétermination doit passer, d’abord et continuellement, par le droit à la désobéissance.

Il y a un certain nombre d’aspects qui caractérisent la désobéissance. Qui désobéi ne se cache pas, bien au contraire. L’action de désobéissance prend tout son sens de que elle est publique et socialisée. On essaye de focaliser toute l’attention sur l’injustice que l’on dénonce par la voie de l’action de désobéissance. C’est pour cela que celui qui désobéi assume toutes les conséquences légales de son action. Ce pour cette raison nous sommes restés pour défendre les écoles en assumant la répression, pendant toute le referendum. On assume aussi l’exile et la prison comme défense du referendum. La répression et la sanction visualisent l’injustice mettant en évidence à celui qui sanctionne, l’Etat. On accepte la répression afin qu’elle se retourne contre le répresseur. C’est comme ça qu’on interpelle à ceux qui sont sensibles à la cause pour les faire prendre parti. Il ne s’agit pas du tout d’un acte individuel, mais tout à fait collectif : on désobéi au nom et en défense des intérêts collectifs. C’est comme ça que la désobéissance et la résistance civile active et non violente nous permet de rendre évident ce que, dans un contexte d’obéissance et consentement, les appareils de l’état ont la capacité de garder presque invisible leur caractère éminemment coercitif et répressif. C’est-à-dire tout ce qui nous garde soumises à la volonté et aux intérêts des élites autonomiques, d’état et européennes.

Il s’agit d’une stratégie de confrontation politique que, en défense et en revendiquant des droits sociaux et politiques que l’on refuse de nous octroyer, cherche à rendre visible aux pouvoirs établis. Cela comme un levier pour sensibiliser et mobiliser. Le 1er Octobre, la prison et l’exile on fait plus pour l’internationalisation du processus d’autodétermination catalan que n’importe quelle action que le Gouvernement catalan aurait pu faire pendant les derniers 30 années. Avec ces actions le caractère profondément antidémocratique de l’état espagnol –version régime 78– apparait, lentement, à la lumière publique.

Cette situation synthétise, on dirait que de manière parfaite, la logique de la désobéissance active et non-violente. D’un côté, il apparait comme évident que désobéir implique des coûts très élevés, comme ceux qui sont en train d’être assumés par toutes les personnes représaillées, à commencer par les prisonniers et les exilés. Au même temps il devient évident que si on résiste et on persiste dans la voie de la désobéissance cela se retourne et les coûts que l’état doit assumer pour maintenir la répression deviennent chaque jour plus élèves et, par conséquence, plus difficiles d’assumer soit au niveau domestique soit au niveau international.

Le referendum du 1er Octobre signifie donc, en termes de pouvoir et d’état, un point de non-retour. Pour le bien ou pour le mal rien ne sera jamais comme avant. Une fois initiée la voie de la désobéissance, le dilemme actuel devient si nous persistons dans la recherche et la construction d’un futur plus juste pour tous ou si, une fois la bête du 78 est lâché, nous allons baisser la tête en acceptant un futur avec encore moins de droits et de libertés que celles que apparemment nous étions en train de jouir. Les événements de septembre et octobre 2017 nous indiquent quel est le chemin à suivre. Au-delà des résultats et de la très haute participation dans un contexte de répression farouche, ce qu’il faut réellement ressortir du referendum c’est la combinaison entre désobéissance institutionnelle et désobéissance civile et populaire.

Le referendum désobéissant fut en effet la clé qui commençe à ouvrir toutes les serrures des portes fermées en 1978 à l’Etat espagnol. Les dernier mois montrent et démontrent que c’est la seule manière de faire bouger la communauté internationale et l’état. L’objectif de la désobéissance n’est jamais imposer rien à personne -çe serait un oxymoron inacceptable et insoutenable- mais construire un cadre où il soit possible exercer les droits revendiqués. La désobéissance ne prétend pas finir avec le système légal mais le transformer pour le faire devenir plus respectueux avec la réalité sociale et politique dans un moment historique précis. Transformer, non pas pour bénéficier uniquement à ceux qui demandent le changement et nuire à tous les autres, mais construire un cadre qualitativement et significativement mieux pour tous. Encore plus, la voie de la désobéissance n’exclut pas un scénario d’accords, bien au contraire il le rend plus possible en générant les conditions nécessaires afin que la communauté internationale et l’état espagnol se voient dans l’obligation de reconnaitre le droit à l’autodétermination. C’est donc, le seul chemin possible vers la résolution démocratique du conflit, compte tenue de l’attitude et la position de l’Etat espagnol

ça n’est pas pour demain et ça n’arrivera pas sans des souffrances additionnelles. Si nous avons décidé construire l’objectif de l’autodétermination comme un droit à exercer, celui devrait être l’objectif partagé pour tous et toutes que croient qu’il ne peut pas avoir de meilleur futur que celui qui est décidé de façon collective.

11 de febrer de 2019