Dans ces jours auront lieu les procès de l’Instruction Générale que l’État espagnol et son pouvoir judiciaire ont débuté au cours du mois de novembre 2017. Ils auront lieu contre les responsables politiques et gouvernementaux du Référendum d’Autodétermination du 1er Octobre.

Il s’agit d’un procès politique contre le Droit à l’Autodétermination du peuple catalan, un procès où tous les indices – politiques, juridiques et historiques – permettent de conclure à l’avance que leur issue se terminera par des sentences de prison et interdiction de participation à la vie publique pour les personnes concernées.
L’objectif de l’Etat espagnol consiste justement à punir de façon exemplaire les responsables politiques et gouvernementaux du Référendum d’Autodétermination du premier Octobre 2017 pour faire en sorte que plus jamais personne n’ose essayer à nouveau une voie politique qui puisse remettre en question l’intégrité territoriale de l’Etat espagnol et qui vise, par conséquent, à empêcher n’importe quelle voie de prise de pouvoir populaire. Ceci constitue une menace pour les pouvoirs – politiques, juridiques, économiques et médiatiques – qui garantissent l’intégrité territoriale de cet état, ses prébendes et privilèges.
Ce qui est en jeu dans ce procès, ainsi, n’est pas seulement la liberté et droits politiques et civils des personnes qui seront jugées au sein des divers procès judiciaires encadrés dans cette Instruction Générale (au Tribunal Suprême, à l’Audience Nationale et au Tribunal Supérieur de Justice de Catalogne), mais au contraire la possibilité que le peuple catalan – ou n’importe quel peuple de l’Etat espagnol – puisse exercer le droit légitime à l’autodétermination.
- Quel est l’objet du jugement ?
En bref, on juge le processus politique d’exercice du droit à l’autodétermination vécu en Catalogne les dernières années. Les écrits d’accusation parlent de l’accord de gouvernement entre les principales forces politiques souverainistes ERC et CiU (2012), toutes les résolutions adoptées par le Parlement de Catalogne de recherche d’une solution bilatérale sur l’exercice du droit à l’autodétermination, la consultation du 9 novembre 2014 et ultérieurement sur la préparation et exécution du référendum d’autodétermination du 1er octobre 2017.
Le contenu de l’accusation part des manifestations massives et répétées de milliers de personnes et de l’activité politique de l’indépendantisme institutionnel pendant ces années (discours qui s’y sont matérialisés, ainsi que les lois passées, commissions d’étude, déclarations institutionnelles et même les messages sur Twitter des leaders indépendantistes.
La thèse de l’Etat est que l’indépendantisme (moyennant 3 acteurs : Parlement de Catalogne, Gouvernement Catalan et société civile mobilisée) prétendaient imposer l’indépendance par la force de la mobilisation citoyenne, en allant jusqu’à assumer l’usage de violence, et ce même si ni appel à la violence ni incitation à des actions violentes ont eu lieu.
- Acteurs des procès : qui est qui
La partie accusatrice est représentée par le bureau du procureur, organise à qui on attribue la protection de la légalité – mais qui paradoxalement ne s’oppose pas à enquêter la violence policière déployée le 1er octobre 2017-, le plaidoyer de l’Etat, cabinet juridique du gouvernement central et qui agit en protecteur des ressources publiques, et finalement l’accusation populaire exercée par VOX.
Sont objet d’accusation tous les membres du gouvernement catalan d’automne 2017, les présidents des entités civiles ANC et Òmnium Cultural, et les principaux acteurs parlementaires (les membres partisans du débat autodéterministe du siège du Parlement et les porte-paroles de Junts pel Sí et la CUP). Le macro-procès a affecté 25 personnes en tout.
Le Tribunal où se déroulera le procès est la Salle Pénale du Tribunal Suprême, la plus haute instance judiciaire espagnole, située à Madrid, dont les membres sont élus par une instance de gouvernement des juges à la majorité du Parti Populaire depuis de nombreuses années, fait qui a converti le tribunal en ultra-conservateur et aligné avec les thèses de la droite espagnoliste. Durant l’instruction ceci a fait l’objet de discussions car ce fait suppose une décision inouïe qui perturbe le cours naturel, qui faisait partie du Tribunal Supérieur de Catalogne, situé à Barcelone. Les juges qui siègeront le procès, en plus, ne connaissent pas la langue catalane, officielle en Catalogne et celle qui est propre aux accusés.
- Rôle de l’extrême droite : VOX impulse la judiciarisation de la politique
VOX est un parti d’extrême droite contraire à l’immigration, au féminisme et à l’indépendantisme qui depuis le début du processus politique a interposé de façon répétée des dénonciations pénales pour provoquer la judiciarisation du procès politique. Maintenant la macro-instruction est l’unique accusation populaire, une figure qui est particulière à la législation espagnole et qui permet que la citoyenneté participe aux procédures judiciaires du pénales sens être liés aux positions des accusations officielles du bureau du procureur et la représentation de l’instance concernée, en l’occurrence le bureau du procureur de l’Etat.
Les pétitions de VOX sont toujours désorbitées et répondent à une logique de droit autoritaire et pré-démocratique. Malheureusement, lorsque le bureau du procureur a accepté de rabaisser la tension –en relation à une certaine prison provisoire- le Tribunal Suprême s’est aligné avec VOX. Selon un système accusateur tel que l’espagnol, le rôle de VOX sert au Tribunal pour se maintenir dans l’extrémisme s’il le considère ainsi.
- Prison, exil, et requêtes du procureur : réponse aux euro-ordres et pétitions d’extradition d’Allemagne, Belgique Royaume Uni et Suisse
La procédure est régie par les délits de rébellion, sédition, détournement de fonds publics et désobéissance comise par l’autorité contre 25 personnes, parmi lesquelles seul 18 seront jugées dans ce procès car elles se trouvent au sein de l’Etat espagnol. Parmi ces personnes, se trouvent en prison provisoire les présidents de l’ANC et OC, quatre conseillers, une conseillère et viceprésident du Gouvernement Catalan et la Présidente du Parlement, 9 prisonniers au total. Le restant se trouve en liberté.
En exil se trouvent deux conseillères, deux conseillers et le Président du Gouvernement Catalan, ainsi que les porte-paroles de Junts pel Sí et la CUP. Sept personnes exilées au total.
Le bureau du procureur formule des accusations de rébellion, détournement de fonds publics et désobéissance en demandant des peines qui vont depuis l’amande administrative accompagnée d’interdiction d’exercice de fonction, jusqu’à 25 ans de prison. Le plaidoyer de l’Etat accuse de sédition, détournement de fonds publics et désobéissance en demandant des peins qui arrivent au maximum à 12 ans. VOX formule des accusations de double rébellion, et en plus de tout ce que formule le bureau du procureur y apporte également organisation criminelle tout en appelant à une peine maximale de 74 ans.
En relation avec les personnes en exil, celles-ci ont été objet de demande de détention internationale. Ceci a comporté pour ceux qui se trouvent au sein de l’UE, l’ouverture de procédures en Ecosse, Belgique et Allemagne. En aucun des cas la prison provisoire n’a été accordée en attente d’une décision définitive. Le seul tribunal qui a accepté de rentrer dans le fonds de la question a été le Tribunal Supérieur de Schlesswig-Holstein qui avait rejeté de livrer le Président du Gouvernement Catalan en en exil, car selon la législation allemande les faits du procès ne sont pas constitutifs de délit en Allemagne. Ce fait a comporté le retrait des instructions/enquêtes en Ecosse et en Belgique.
Dans le cas de la Suisse, le Ministère de Justice a manifesté que les requêtes d’extradition étaient des cas clairs de délits politiques et que par conséquent les autorités de la fédération n’accèderaient pas à l’extradition des personnes qui se trouvaient au sein de leur territoire.
Dans l’actualité, il existe un ordre de détention de toutes ces personnes seulement en vigueur au sein du territoire espagnol parce que les juges du Tribunal Suprême ont renoncé à la coopération judiciaire internationale dans ce cas.